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[INTERVIEW] Sophie Charles : « Là où les réponses tardent à arriver, les faits violents suivent une trajectoire inverse »
Propos recueillis par Gaëtan TRINGHAM, g.tringham@agmedias.fr
vendredi 11 octobre 2024
Les élus de Saint-Laurent continuent leur sit-in devant la sous-préfecture pour dénoncer la violence dans leur ville. Ils restent dans l’attente d’une réponse du courrier envoyé au Premier ministre la semaine passée. Entre-temps, les faits violents continuent dans la ville. Les réponses du Maire Sophie Charles sur la situation.
Vous avez déjà obtenu un accord du préfet pour l’augmentation des effectifs de gendarmerie. Qu’attendez-vous exactement en plus ?
Nous avons reçu un accord verbal, lors de la réunion de crise du jeudi 3 octobre, en présence du préfet et du général de gendarmerie la suite de laquelle j’ai adressé un courrier au Premier Ministre. Nous avons indiqué vouloir une réponse officielle, c’est-à-dire une réponse écrite avec un calendrier précis de l’affectation des forces supplémentaires promises.
La réalité sur le terrain est inquiétante, nous vivons dans la peur au quotidien, confrontés à une insécurité omniprésente. L’État doit non seulement respecter ses engagements, mais aussi montrer qu’il prend la mesure de la situation en déployant immédiatement les ressources nécessaires.
Le sit-in continuera tant que le PCR Margot est maintenu ? Que vous a-t-on dit pour l’instant à ce sujet ?
Nous souhaitons que les effectifs du PCR Margot soient positionnés là où ils sont vraiment nécessaires, c’est-à-dire en ville et sur la frontière. Cela permettra également à la police aux frontières et à la douane de se concentrer sur leurs missions premières. Par ailleurs, nous attendons une évaluation sérieuse de l’impact de ce poste sur la sécurité de notre ville.
Il ne s’agit pas seulement d’une question opérationnelle, mais également d’un reflet des inquiétudes des citoyens, qui vivent cette situation de confinement par rapport aux autres communes de Guyane comme une sanction injustifiée. Le PCR de Margot isole les habitants et entretient la criminalité à l’intérieur de la ville, les contrôles ayant lieu uniquement à la sortie de la ville. Nous avons besoin de mesures concrètes de la part des autorités pour rétablir la confiance.
• Ville de Saint-Laurent-du-Maroni
Vous dites dans votre courrier au Premier ministre que « l’Etat doit pouvoir se concentrer sur la véritable frontière, c’est-à-dire sur le contrôle du fleuve Maroni. » Un contrôle efficace de ce fleuve tout du long n’est-il pas impossible ? Que proposez-vous ?
En insistant sur le contrôle du fleuve Maroni, je demande à l’État de faire respecter ses frontières comme dans n’importe quel autre territoire français. Rien n’est incontrôlable, surtout sur un territoire qui abrite un port spatial, il suffit d’adopter des moyens techniques modernes.
L’utilisation de drones équipés de caméras haute résolution et de systèmes de reconnaissance automatique d’images peuvent détecter des activités suspectes en temps réel. L’intelligence artificielle peut analyser les données recueillies pour améliorer l’efficacité des patrouilles et des interventions, et par conséquent contrôler le fleuve en permanence. Ces mesures sont essentielles pour protéger notre communauté, qui vit dans la peur, et pour lutter efficacement contre la criminalité transfrontalière. Le contrôle de la frontière ne réglera pas tous les problèmes, mais il va diminuer les flux illégaux.
Le réel problème n’est-il pas le mépris/le manque de considération que vous dénoncez et dont vous dites êtres victimes ?
Depuis le début de l’année, c’est la troisième fois que j’interpelle le gouvernement. J’ai sensibilisé tous les interlocuteurs, tant au niveau local que national, car la question de la sécurité est fondamentale. J’ai écrit au Premier ministre et j’attends une réponse officielle de sa part. Je n’ai pas sollicité d’entretien avec la sous-préfète, donc je ne ressens pas personnellement de mépris. Cependant, ce que je ne peux pas accepter, c’est qu’elle n’ait pas joué son rôle d’interface entre la municipalité et le gouvernement.
Lorsque des élus en écharpe se tiennent devant votre institution, il est inconcevable de quitter la commune, pourtant, c’est ce qu’elle a fait. Ce mépris ne concerne pas seulement les élus, mais aussi la population que nous représentons. Nous sommes les relais du stress et de la peur vécus par nos concitoyens, une peur qui grandit chaque jour. Les carences de l’État face à nos demandes renforcent ce sentiment d’abandon et génèrent des émotions négatives. En tant que maire, je suis déterminée à me battre pour offrir un cadre de vie digne et serein aux 80 000 habitants qui vivent sur le territoire que je sers. Je tire la sonnette d’alarme, et cela vaut pour tous mes collègues élus, pour éviter que nous arrivions à des situations extrêmes et irréversibles.
Comment la situation évolue-t-elle depuis mardi, date à laquelle vous avez commencé le sit-in ?
Là où les réponses tardent à arriver, les faits violents suivent une trajectoire inverse. Depuis mardi soir, les actes criminels se multiplient à Saint-Laurent du Maroni. Mercredi, un homme a été blessé par balle et transporté au CHOG. Quelques heures plus tard, ses agresseurs, ayant appris qu’il était toujours en vie, se sont introduits armés à l’hôpital pour tenter de le tuer.
Le même jour, une femme a été agressée alors qu’elle retirait de l’argent au distributeur près du quartier des écoles. Cela a déclenché une série de coups de feu qui a duré plusieurs heures. Ensuite, un chauffeur de bus a été pris pour cible par des tirs. Ce matin encore, des coups de feu ont été entendus à proximité de l’école Giffard, alors que des enfants partaient en sortie scolaire. Pour couronner le tout, un vétérinaire a été agressé devant son cabinet par un toxicomane. Pendant que nous attendons des réponses, la violence continue d’augmenter. Les armes se louent désormais pour 45€ par jour dans le quartier Vietnam, et les coups de feu sont devenus une réalité quotidienne.
• Réseaux sociaux
NDLR : France-Guyane a sollicité la préfecture en début de semaine pour connaitre leur position sur le retrait du PCR Margot. Cette demande n’a pas été suivie de réponse pour l’instant.
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